L’amputation inévitable
Pour cette sportive accomplie passionnée de marche nordique (méthode OTOP) basée à Bergerac, l’accident est arrivé brutalement. Le 3 juillet 2023 un jeune sous stupéfiant lui a coupé la route alors qu’elle était à moto. Après un mois à l’hôpital, le constat était sans appel : une cheville irrécupérable avec un risque d’infection. D’où la décision inévitable de devoir amputer.
Sur son lit d’hôpital cette entrepreneuse qui a créé en 2019 sa propre salle de sport se met en tête de réaliser un challenge. « Il me fallait un projet pour me porter et me motiver dans ma rééducation », confie -t-elle. Elle pense alors à marcher sur le Chemin de Compostelle et demande à son frère de l’accompagner. Celui-ci accepte et peu à peu, alors qu’elle réapprend à marcher dans un centre de réadaptation, le projet mûrit. Ce sera un parcours de 182 km sur le Chemin de Compostelle entre Puy-en-Velay et Conques.
Une rééducation menée tambour battant
Dans le centre de rééducation Aurore apprend pendant trois mois (de septembre à novembre) à se stabiliser sur un pied et à marcher avec l’aide d’une barre, puis avec des béquilles. « J’avais perdu 10 kg, mais j’avais la mémoire du muscle dans mon corps, explique -t-elle. Elle applique un programme de renforcement musculaire musclé en faisant travailler petit et moyen fessier, quadriceps et ischio-jambiers.
Elle est équipée d’une prothèse basique en plastique dur et dès les débuts son prothésiste, Domital Orthopédie, qui deviendra son sponsor, est impressionné par sa progression rapide. Elle ne tarde pas à le convaincre de l’équiper d’une prothèse en carbone plus légère avec un pied technique pour le Chemin de Compostelle.
La renaissance sur le chemin de Compostelle
En février-mars 2024 Aurore recommence à marcher nordique. Elle reprend ses bâtons de marche nordique, des Lékis, avec une taille plus grande pour aller plus loin derrière. Au début elle marche sur une distance de 1 km, puis très vite de 5 km à chaque séance. « Je suis arrivée à retrouver ma gestuelle avec la même ouverture d’épaules, mais je vais moins vite. J’ai compris que les bâtons m’aidaient », précise -t-elle. Pour son frère, ce sera avec des bâtons de randonnée. Le départ est fixé au 2 juin à Puy-en-Velay.
Pendant 10 jours, ce sera un rythme de près de 20 km par jour avec un départ tôt le matin et une arrivée aux alentours de 15h. « Le terrain était très varié avec beaucoup de montées et de descentes. La deuxième journée a été particulièrement difficile avec 900 m de dénivelé en descente, de la pluie et de la boue. J’ai eu mal au tibia car il tapait dans ma prothèse quand je marchais. Mais au final, j’ai déposé une partie de mon chagrin et de ma tristesse au bord du chemin, explique -t-elle. Le regard admiratif de tous ceux que je croisais m’a aidé à commencer d’accepter mon handicap, ajoute -t-elle. Même mon prothésiste m’a dit qu’en 20 ans de pratique il n’avait jamais vu quelqu’un marcher 20 km par jour pendant 10 jours sans se blesser ! »
Un nouveau départ
Bien sûr il y a toujours cette douleur fantôme qui revient quand Aurore marche, comme si elle avait toujours son pied. « Ce sont comme des décharges électriques très fortes avec des fourmillements dans le pied car le cerveau garde en mémoire la muscularisation », explique -t-elle. Bien sûr il y a aussi toujours la difficulté du regard sur soi et de se voir dans un miroir. Mais pour Aurore, ce Chemin de Compostelle a été le déclencheur d’un nouveau départ. « Cela m’a redonné du boost et m’a beaucoup apporté humainement car avant ce parcours je n’avais plus la motivation pour me lever le matin », souligne -t-elle.
Désormais Aurore a de nouveaux objectifs. « Je veux sensibiliser sur la manière de voir le handicap et également sur tous les dangers liés à la consommation d’alcool et de stupéfiants au volant ». Aurore a également décidé de rouvrir sa salle de sport en septembre avec l’aide d’une coach de fitness spécialisée en posturologie méthode De Gasquet et d’une prof de yoga. Elle organise avec son association Héméra Sport Santé pour tous (déesse grecque de la lumière) des sorties de marche nordique, des cours avec la méthode De Gasquet et des week-ends bien-être. « Pour me soutenir toutes les clientes de ma salle de sport sont devenues adhérentes de mon association », annonce avec fierté Aurore.
Juin 2025 : le projet Tandem24 Handi&Pas
Mais cela ne suffit pas à Aurore : elle s’est déjà lancée dans un nouveau défi pour juin 2025 : le projet Tandem24 Handi&Pas. Concrètement l’idée est de rassembler 10 binômes valides/handicapés qui vont parcourir en tandem vélo du 29 mai au 5 juin prochains 150 km en 7 étapes dans les Gorges du Verdon. Le départ et l’arrivée sont prévus à Manosque avec des arrêts dans des écoles et des hôpitaux pour des actions de sensibilisation au handicap et à la sécurité routière. « Les maîtres-mots de ce projet sont ceux de résilience, de partage et d’esprit d’équipe », explique Aurore. Elle sera elle-même en binôme avec sa fidèle amie Magali Imberti. Pour compléter l’équipe, deux personnes seront en vélo classique à l’avant du groupe et deux autres à l’arrière, soit un total de 24 cyclistes.
Voir la vidéo du projet
Toutes les aides sont bienvenues. Des repérages sont prévus à Manosque du 18 au 22 septembre. N’hésitez pas à apporter votre contribution à la cagnotte mise en place !
Voir Lien vers cagnotte.
D’autres projets avec des équipes mixtes valides/non valides germent déjà dans la tête d’Aurore. Celle-ci a obtenu de son prothésiste une prothèse lame qui lui permet de courir. « Je cours deux fois par semaine, ce sont de belles sensations », affirme -t-elle. Une nouvelle prothèse carbone définitive adaptée à sa taille (le mollet maigrit au bout d’un an) va lui être fournie. Le chemin d’Aurore ne fait que commencer !