Et de trois… championnats en duo
C’est notre 3ème Championnat de France. Nous avons démarré la compétition en nous jetant dans le grand bain, à Autrans dans le Vercors pour participer avec notre club d’alors, le Quimper Athlétisme, sans trop savoir ce que l’on valait, au petit bonheur la chance. Notre entraînement était alors régulier et rigoureux, mais nous étions en maternelle ! Puis nous nous sommes accrochés : en suivant à la lettre le programme d’entraînement et en parcourant, quasi chaque week-end, la Bretagne et plus loin si affinités, pour acquérir de l’expérience lors des courses locales et régionales. Les efforts paieront pour nous deux.
Avec nos résultats encourageants à Chamarande, nous sommes admis au collège ! Nous quittons le Quimper Athlétisme pour trouver une ambiance sportive qui nous correspond davantage (le milieu amateur n’est – hélas ! – pas épargné par l’acrimonie et la jalousie), pour entrer en internat, avec autorisation de sortie, à Courir à Saint-Avé, où s’entraînent Nathalie Jaunet, Olivier Guillemin et d’autres marcheurs émérites et chaleureux.
La Chapelle-sur-Erdre : la confirmation
Comme pour beaucoup, il fallut mettre les bouchées doubles pour avaler une prépa en à peine trois mois d’entraînement et être fin prêts en décembre. Comme à beaucoup, il nous manquait une course pour la qualification que nous sommes allés chercher à la Roche-sur-Yon en novembre. Le programme concocté par Jean-Yves Jaunet était progressif en intensité, nous sentions chaque semaine la difficulté augmenter, le cardio chauffer, sous la pluie glacée de la Bretagne en automne. Nous retrouvions nos amis Camille et Jean-Luc le samedi matin pour des entraînements complémentaires.
Nous pratiquons le yoga et j’agrémente mon programme de sorties course à pied avec deux copains coureurs, Vincent et Julie. Nous étions bien accompagnés. Le 2 décembre, nous étions parés et déterminés à TOUT donner, l’un comme l’autre. Comme dira mon cousin, j’étais « remontée comme une pendule, montée sur ressorts », aussi calme que Woody Woodpecker. Après une bonne nuit au calme et dorlotés par mes cousins à Couëron, nos dossards récupérés la veille, nous arrivons sur zone samedi avec l’heure d’avance habituelle. Les camarades du HBA sont en train de manger des casse-croutes au pâté Hénaff. Pascal sera mon accessoiriste-chambellan pendant toute la durée de mon échauffement… que je passe à saluer les copines d’un peu partout de France que je me suis faites au fil des compétitions (et aussi Facebook) ça crée des liens ! Hop, hop, un peu de gammes et des accélérations.
En place, l’artiste !
Je ne réfléchis pas trop à la stratégie de départ. Mal m’en prit. La suppression des sas de départ s’est révélée plutôt une mauvaise idée, le peloton prit les allures des villageois dans Astérix et Obélix quand ils partent à l’assaut des Romains. « Et que j’mette devant alors que je fais un démarrage de randonneuse, que je t’pousse, et que je t’marche sur les bâtons », bref… je manque de me casser la margoulette, retrouve in extremis mon équilibre, telle la patineuse artistique juste avant le gadin. Outre le fait que c’est pas joli-joli à voir, c’est dangereux et propice aux fautes. J’ai complètement foiré mon départ moi qui ai l’habitude de partir au-dessus de ma vitesse max.
Afin de retrouver ma vraie vitesse, je décide de me déporter complètement sur la gauche en me plaçant donc à l’opposé de la corde. Les chemins rétrécissent… Les racines signalées mettent des taches de lumière sur notre parcours.
Le bulldozer entre en action…
Je me transforme en petit bulldozer. Les photos prises par les nombreux photographes en témoigneront. Je précise : ce n’est pas moi. Que personne ne me dise que je ressemble à ça. Je ne pense qu’à ma course. Je crois n’avoir jamais été aussi concentrée de ma vie. Même pas pour mon permis de conduire, ni à mes entretiens d’embauche (j’aurais peut-être dû !). Aucune pensée parasite ne viendra me perturber, comme parfois certaines idées incongrues te foncent dessus et se plantent dans le crâne… Je n’entends que les encouragements. À chaque tour, j’entends mon coach « continue comme ça ! ». Je vous jure que les encouragements vous changent une course. J’entends l’ami Stéphane Grégoire, venu exprès de Rennes soutenir ses anciens camarades.
Je sens la présence chaleureuse d’une copine marcheuse non qualifiée, Véronique Doiteau, et Jean-Yves Caudal, venus pour nous prendre en photo. C’est un sentiment de reconnaissance incroyable qui t’envahit et te donne des ailes. J’aurais inévitablement des moments dans le dur, dans le rouge, ma montre me le dira après. Mais je n’ai rien senti, complètement shootée à l’adrénaline. Une amie de Redon me le confirme aussi : « tu étais à fond, ton visage montrait une incroyable détermination ». Mon prof de yoga nous enseigne les postures du guerrier avec « le regard déterminé, loin devant ». C’est devenu un réflexe. Malgré quelques kilos en trop, je me sens portée.
Nathalie, Céline, Nausicaa, les copines de course
Je suis dans un groupe avec Nathalie Liard des Achards, Céline Beucher du HBA et Nausicaa Mainguy du club d’Ancenis qui sont un peu devant. À force de nous retrouver dans les courses, nous sommes devenues proches camarades et avons noué une amitié fraternelle. D’ailleurs Nausicaa écrira dans son compte rendu que Céline lui a laissé la place pour la doubler (au grand dam du “Pirate”, alias Denis Leux, l’entraîneur du HBA). Nathalie reste un poil derrière. Une autre M2 m’agrippe par deux fois les bâtons. Je râle sur le moment, mais ce sont des choses qui arrivent en compétition, il faut passer au-dessus de cela. Je mets les gaz et je remonte avec constance, je gratte chaque place en relançant systématiquement dans les côtes, j’accentue mon attaque et j’allonge la foulée.
Je ne vois même pas les juges, tendue à l’extrême pour avancer et mobiliser la totalité de mon énergie. Si je perçois une juge devant moi, qui m’observe attentivement, sous toutes les coutures, je me concentre sur ma respiration. Je suis sûre de mon alignement et de mes poussées. Vers le début de la 4ème boucle, j’entends un photographe (merci Eric Woimant !) donner les places, c’est stimulant. Ça y est, j’ai dépassé Céline.
Je cherche encore à remonter sur Nausicaa. Elle me sent juste derrière et continue de foncer à toute allure, sans un signe de faiblesse. Je pense pouvoir la raccrocher, mais d’avoir consulté la distance sur ma montre – 11,400km – me donne l’illusion d’avoir encore 1km à parcourir avant l’arrivée. Je réalise trop tard mon erreur – est-ce mon GPS complètement à l’ouest ou la distance annoncée de 12410 mètres qui serait fausse ? – je ne le sais pas, mais mon sprint final sera trop court pour remonter sur ma copine. Nausicaa, je te rattrape la prochaine fois ! Mon Chéri m’attend près de l’arrivée à 1:27:31. Je me devine 4ème M2, car les trois premières de ma catégorie finissent 4ème, 15ème et 16ème. Je finis loin derrière en 29ème position, mais je reste dans le top 30, ce qui était mon objectif ! (YES !!!)
11h30 Place aux Hommes
De constitution réfléchie et posée, Pascal se positionne bien devant sur la ligne d’arrivée. Pas de bol. Certains cadors jouent des coudes et mon Champion à moi se retrouve bloqué sur deux kilomètres, sans pouvoir mettre ses longues pattes d’aigrette en action. Il voit bien Guillaume Le Meur et Bruno Prioux, les deux locomotives du Quimper Athlétisme, qui, eux, ont déjà pu commencer leur course.
Il lui faudra 3 boucles et demi pour les remonter. Patiemment, avec un acharnement qui ne se lit pas sur son visage, toujours souriant, un peu moqueur, il gratte les 22 places qui le séparent de ses anciens complices.
La remontée lentement mais sûrement
Sans doute ne sont-ils pas aussi contents de le voir rappliquer que lui de les talonner, mais ce sont là les joies et les surprises de la compétition ! Il va donc passer la moitié de la 4ème et dernière boucle à leurs côtés, ne les double pas, histoire de récupérer de cette ascension qui lui a beaucoup coûté. Il souligne aussi que la difficulté de ce type de situation réside dans le fait qu’il soit resté isolé durant toute cette partie, sans pouvoir bénéficier d’une dynamique à plusieurs.
Enfin la dernière ligne droite, homérique espace, l’endroit de tous les duels… C’est une descente herbeuse qui se déroule en faux plat jusqu’à l’arrivée. Bruno et Guillaume, grands sprinters devant l’éternel, passent encore à la vitesse supérieure. Sur le côté, les femmes hurlent sur Pascal. Mes copines avec moi donnent en chœur du « MON CHERI, MAIS TU VAS FONCER OUI !!! ». Toute notre énergie dans les ultimes encouragements n’aura pas suffi. Pascal, épuisé, arrive derrière ses anciens camarades du QA, à une poignée de secondes. Soit le 45ème H, avec un chrono de 1:20:30 !
« J’ai voulu aller m’offrir une bière de récupération (comme le conseille notre coach ;)), mais la tireuse était en panne… De toutes façons, une fois qu’elle m’a félicité, ma chérie me quitte aussitôt pour retrouver ses copines et copains avec lesquels elle va discuter jusqu’aux podiums, et encore après ! » (y compris lundi et mardi pour débriefer au lieu de bosser). J’ai retrouvé Olivier Guillemin pour le féliciter copieusement de sa 2ème place. Il est bon pour nous payer un coup aux prochaines courses du Morbihan. » À bon entendeur salut !
Les plus et les moins de l’épreuve
Points forts :
• un très beau parcours, parfaitement adapté à la marche nordique et à une compétition de France,
• l’accueil chaleureux des bénévoles, souriants et sympathiques,
• Les consignes, la possibilité de prendre une douche chaude,
• une organisation technique bien ajustée (y compris le travail des juges…).
Points faibles :
• L’absence de sas,
• L’absence d’un vrai ravito à l’arrivée,
• L’organisation pour les repas (et le recours aux emballages plastiques, un peu malheureux à notre époque, ainsi que l’absence de formules vegan et non-porc),
• Les prix, sans jolie médaille pour les Finishers,
• La course de la Grolle prévue pendant les podiums et des Podiums qui semblaient peu ou mal préparés.